Les Etats-Unis disposent d'une législation très fournie en matière de sanctions économiques et embargos, qu'ils entendent faire respecter y compris par les entités étrangères à l'étranger, selon une approche extraterritoriale assumée, justifiée par la "sécurité nationale".
Les sanctions appliquées en cas de violation de cette législation reposent généralement sur une conception extensive des principes généraux de compétence territoriale.
Ainsi, pour les Etats-Unis, il suffit pour qu'une entité étrangère puisse être inquiétée par les tribunaux américains qu'elle ait effectué une transaction interdite au travers d'une US Person, que cette dernière soit une personne physique ou morale.
L'implication d'une personne morale américaine
C'est sur ce fondement que la banque BNP Paribas a pu être sanctionnée, en 2005, pour avoir violé la législation américaine International Emergency Economic Power Act, loi fédérale de 1977 qui autorise la présidence américaine à restreindre les relations commerciales avec certains pays. En effet, BNP Paribas avait effectué des transactions avec l'Iran, en dépit de l'embargo américain. Or, en tant qu'elles étaient libellées en dollars, ces transactions avaient transité par des institutions financières américaines, US Person de type personnes morales. Ce critère de rattachement territorial a pu suffire à justifier la compétence juridictionnelle des Etats-Unis.
L'implication d'une personne physique américaine
De même, une transaction commerciale effectuée à l'étranger par une entité étrangère, en violation de la législation économique américaine, serait semble-t-il tout autant condamnable par les tribunaux américains si elle faisait intervenir une US person de type personne physique. C'est en tout cas l'interprétation que fait la Banque publique d'investissement (BPIfrance) du droit américain, laquelle a décidé d'écarter ses collaborateurs US Person (par détention de la nationalité ou d'une simple carte verte) de toute procédure interne ayant pour objet le commerce avec l'Iran (que la BPI entend développer). La BPI entend ainsi se prémunir contre toute tentation des Etats-Unis d'invoquer ce critère de rattachement territorial pour engager des sanctions.
Néanmoins, ce raisonnement a des effets collatéraux délétères, puisqu'il conduit la BPI à mener une politique discriminatoire à l'encontre de ses collaborateurs de nationalité américaine (qu'ils soient mono-nationaux ou binationaux), y compris donc ses collaborateurs franco-américains, en dépit du code du travail qui prohibe toute discrimination fondée sur la nationalité. Ainsi, chose étonnante et hautement contestable - tant sur un plan légal que moral - la BPI, banque exclusivement française traitant en euros, n'hésite pas à violer le droit français pour respecter le droit américain !
--> Voir les révélations du Canard Enchaîné daté du mercredi 31 janvier 2018, ci-contre.
The United States has extremely detailed laws on economic sanctions and embargoes, and tries to ensure they are respected by all companies, including foreign ones operating outside the United States. ‘National security’ is the reason given for this extraterritorial approach.
Sanctions for violations of this legislation are based on an expansive concept of the general principles of territorial competence.
For the United States, a foreign entity can be brought before the American courts for having conducted a banned transaction through a US Person, whether an individual or a corporation.
The implication of an American corporation
It was on this basis that the bank BNP Paribas was fined in 2005 for having infringed the 1977 American International Emergency Economic Powers Act, which allows the US President to restrict commercial relations with certain countries. In this case, BNP Paribas had conducted business with Iran, despite the American embargo. As the transactions were carried out in dollars, they had moved through American financial institutions, which are US Persons in the corporate sense.
The implication of a physical American person
Likewise, there is a question whether a commercial transaction undertaken outside the United States by a foreign entity also violates American economic legislation if it involves a physical US Person. The French Public Investment Bank (Banque Publique d’Investissement, BPIFrance) believes it would, which is why it has decided to keep employees who are US Persons (through citizenship or holding a Green Card) out of all operations aimed at trade with Iran. The BPI aims to build up its business in Iran, and wants to protect itself in case the United States decides to invoke the criteria of territorial attachment and impose sanctions.
Nontheless, this reasoning creates collateral damage, because it means that BPI is discriminating against US citizen employees, including dual Franco-Americans, despite the French labor code’s ban on all discrimination based on citizenship. It is surprising and extremely questionable, both legally and morally, that the BPI, a French bank working exclusively in euros, infringes French law in order to comply with American law.
--> See the revelations in the 31 January 2018 issue of the French satirical weekly Le Canard Enchainé :